Section 1 | Gestion du colostrum chez les veaux laitiers

Industrie laitiere
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Comment assurer le succès du transfert passif?

Le transfert passif est considéré comme réussi lorsqu’une quantité suffisante d’immunoglobulines est absorbée dans la circulation sanguine pour protéger contre la maladie.

 

Pour y parvenir, il faut évaluer quatre composantes essentielles1 :

  • La quantité de colostrum administrée
  • La qualité du colostrum servi
  • La rapidité avec laquelle le colostrum est servi
  • La propreté du colostrum servi

 

Un autre élément clé consiste à quantifier le succès du programme de gestion du colostrum en prélevant des échantillons de sang des veaux et en mesurant le niveau de protéines présentes dans leur sang peu après la naissance.

 

La quantité de colostrum

Pour un transfert passif d’immunité réussi, les veaux doivent recevoir environ 100 g d’immunoglobuline G (IgG) du colostrum à leur premier repas après la naissance2. Pour y parvenir, il faut fournir environ 8,5 à 10 % du poids corporel du veau. Cela se traduit par 3 à 4 L pour les veaux Holstein de taille moyenne3,4.

 

La qualité du colostrum

La qualité du colostrum se mesure par la quantité d’immunoglobulines qu’il contient. Un taux >50 g/L d’IgG indique un colostrum de haute qualité5.

 

La qualité peut être quantifiée!

En ce qui concerne la qualité, le changement de gestion le plus important à adopter est de s’assurer que seul du colostrum de haute qualité est utilisé et que le colostrum de mauvaise qualité est éliminé. Cela peut être fait en testant tout le colostrum recueilli pour s’assurer qu’il est de haute qualité avant de le servir aux veaux.

 

Il existe deux outils qui peuvent être utilisés à la ferme :

Réfractomètre Brix6

  • > 22 % sur l’échelle de Brix indique que le colostrum est de haute qualité

Colostromètre7

  • > 80 mg/mL est le seuil suggéré pour déterminer que le colostrum est de haute qualité
    • Cela signifie que le flotteur va se situer dans la zone verte
  • Le colostromètre est sensible à la température; il est le plus précis à température ambiante
    • Des températures plus basses entraîneront une surestimation de la quantité d’immunoglobulines dans le colostrum, tandis que des températures élevées vont mener à une sous-estimation de la quantité d’immunoglobulines présentes

 

Source: ACER Consulting Ltd.

Que dois-je faire si mon colostrum est de mauvaise qualité?

Si >10 % des échantillons de colostrum testés sont de mauvaise qualité (<22 % au réfractomètre Brix ou <80 mg/mL au colostromètre), les facteurs affectant la qualité doivent être étudiés avec le vétérinaire.

 

Plus précisément, il faut évaluer les points suivants en ce qui concerne les vaches en lactation et les vaches taries2 :

Moment de la traite du colostrum par rapport au vêlage

  • Plus le délai de collecte du colostrum est long, plus la concentration d’IgG sera faible

 

Régime alimentaire avant le vêlage

  • Assurer un bon équilibre pour éviter l’excès d’énergie et la carence en minéraux dans l’alimentation des vaches taries

 

Nombre de lactations

  • Les vaches qui en sont à leur troisième lactation ou plus ont un colostrum de meilleure qualité parce qu’elles ont développé une immunité à une plus grande gamme de pathogènes

 

Durée de la période de tarissement

  • S’assurer que la période de tarissement des vaches est supérieure à 5 semaines avant le vêlage car c’est le moment auquel la production de colostrum commence

 

Stress thermique

  • Les vaches qui subissent un stress de chaleur produiront un colostrum de moins bonne qualité

 

Vaccination de la vache

  • La vaccination des vaches de 3 à 6 semaines avant le vêlage augmentera la quantité d’immunoglobulines dans le colostrum contre les pathogènes spécifiques contre lesquels on vaccine

 

Source: ACER Consulting Ltd.

Il est également important de noter que le volume de colostrum produit n’est pas un facteur conduisant à un colostrum de mauvaise qualité. Le colostrum doit être jeté s’il a été testé et qu’il mesure <22 % au réfractomètre Brix ou <80 mg/mL au colostromètre (zones jaune ou rouge), et non pas seulement en fonction du volume produit. Servir du colostrum de haute qualité aux veaux prévient la maladie, et les veaux qui ne sont pas atteints par la maladie durant leurs premiers jours de vie n’ont pas besoin de traitements antimicrobiens.

Servir le colostrum rapidement

Le colostrum doit être servi le plus rapidement possible après la naissance! Les immunoglobulines doivent être absorbées par l’intestin du veau pour le protéger contre les maladies. La capacité des immunoglobulines à traverser l’intestin diminue rapidement avec le temps, ce qui fait que chaque heure de retard à servir le premier repas de colostrum après la naissance entraîne une augmentation de 13 % du risque d’échec du transfert passif de l’immunité8. Par conséquent, il est recommandé de nourrir les veaux le plus tôt possible après la naissance, idéalement avant l’âge de 4 heures.

 

Source: ACER Consulting Ltd.

Servir du colostrum propre

La contamination du colostrum par des bactéries peut avoir des répercussions sur la santé des veaux et l’absorption des immunoglobulines. Si des bactéries se retrouvent dans le colostrum, elles vont se lier aux immunoglobulines et empêcher leur absorption2. Cela entraînera un taux plus élevé d’échec du transfert passif. Le colostrum contaminé contient des bactéries comme Escherichia coli et Salmonella qui peuvent également augmenter le risque de diarrhée et de septicémie (songez aux veaux qui ont la diarrhée très peu de temps après la naissance). Servir aux veaux seulement du colostrum tiré de mamelles correctement préparées dans un seau bien nettoyé réduira la contamination et empêchera l’introduction de bactéries dans la circulation sanguine du veau.

Mieux vaut prévenir que guérir!

 

La propreté, ça se mesure!

On peut évaluer de façon routinière la propreté du colostrum en prélevant et en mesurant des échantillons du colostrum tel que servi aux veaux (ou du colostrum prélevé dans l’équipement servant à nourrir les veaux tel qu’il serait normalement servi aux veaux). La propreté du colostrum est mesurée par la mise en culture d’un échantillon et en déterminant la quantité de bactéries totales présentes, ainsi que la quantité de bactéries coliformes présentes. La présence de bactéries coliformes démontre qu’il y a eu contamination fécale.

Si le colostrum est contaminé par des bactéries (compte total de bactéries de >100 000 unités formant colonie (ufc)/mL et/ou compte total de coliformes de >10 000 ufc/mL), les facteurs suivants devraient être évalués pour identifier les facteurs responsables de la contamination9 :

Préparation du pis

  • La préparation devrait être la même que pour la traite

 

Propreté du pot trayeur

  • Often the collection bucket is responsible for the greatest amount of bacterial contamination

 

Stockage du colostrum

  • Si le colostrum est conservé à la température ambiante, les bactéries peuvent se multiplier rapidement. Il est important de servir le colostrum immédiatement après l’avoir tiré ou de le mettre au réfrigérateur ou au congélateur. Comme les bactéries peuvent tout de même se développer dans le colostrum réfrigéré, il ne doit pas être conservé plus de 48 heures avant d’être jeté

 

Propreté de l’équipement servant à nourrir les veaux

  • Le fait de nettoyer l’équipement à fond empêchera l’introduction de bactéries dans l’alimentation des veaux au colostrum

 

Travaillez avec votre vétérinaire pour déterminer comment la propreté du colostrum devrait être évaluée dans votre ferme.

Quantifier le succès de la gestion du colostrum

Il est extrêmement important de recueillir des données permettant d’évaluer le succès de votre programme de gestion du colostrum à la ferme. Pour ce faire, un des moyens les plus pertinents et les plus pratiques consiste à mesurer à la ferme les protéines sériques totales.

 

Que sont les protéines sériques totales et comment les mesure-t-on?

Les protéines sériques totales représentent la mesure de la quantité de protéines dans le sang et constituent un excellent indicateur du succès d’ensemble du programme de gestion du colostrum. Cela s’explique par le fait la très forte corrélation qui existe entre les protéines sériques totales et les immunoglobulines dans la circulation sanguine.

Les protéines sériques totales sont recueillies par prélèvement d’un échantillon de sang chez les veaux âgés de 1 à 9 jours. Le sang est ensuite passé dans une centrifugeuse et le sérum obtenu est placé sur un réfractomètre pour mesurer le niveau de protéines totales. Si vous avez un réfractomètre Brix, il est possible d’utiliser le même instrument pour analyser les échantillons de protéines totales et recueillir des données sur le taux d’échec du transfert passif dans votre troupeau.

 

Source: ACER Consulting Ltd.

Quelle est la valeur cible des protéines sériques totales?

La concentration cible des protéines sériques totales se situe à > 5,2 g/dL10. Un veau dont les protéines sériques totales sont à < 5,2 g/dL accuse un échec du transfert passif d’immunité. Cela signifie que le transfert d’immunoglobulines de la mère au veau par l’entremise du colostrum destiné à développer le système immunitaire passif du veau a été insuffisant. Cela peut mener à un plus grand risque de maladie. Ces résultats devraient être pris en compte à l’échelle du troupeau. Si plus de 20 % des veaux accusent un échec du transfert passif d’immunité, un changement à la gestion du colostrum s’impose. Il importe également de mesurer les protéines sériques totales d’un nombre de veaux suffisant (au moins 12) avant d’apporter des changements.

Références

  1. Raboisson, D., P. Trillat, and C. Cahuzac. 2016. Failure of Passive Immune Transfer in Calves: A Meta-Analysis on the Consequences and Assessment of the Economic Impact. PLOS ONE.
  2. Godden, S. 2008. Colostrum management for dairy calves. Vet Clin NA: Food Anim. Prac. 24:19-39.
  3. Shively, C.B., J.E. Lombard, N.J. Urie, D.M. Haines, R. Sargent, C.A. Kopral, T.J. Earleywine, J.D. Olson, and F.B Garry. 2018. Preweaned heifer management on US dairy operations: Part II. Factors associated with colostrum quality and passive transfer status of dairy heifer calves. J. Dairy Sci. 101:9185-9198.
  4. Conneely, M., D.P. Berry, J.P. Murphy, I. Lorenz, M.L. Doherty, and E. Kennedy. 2014. Effect of feeding colostrum at different volumes and subsequent number of transition milk feeds on the serum immunoglobulin G concentration and health status of dairy calves. J. Dairy Sci. 97:6991-7000.
  5. McGuirk, S.M., and M. Collins. 2004. Managing the production, storage, and delivery of colostrum. Vet. Clin. North Am. Food Anim. Pract. 20(3):593-603.
  6. Bielmann, V., J. Gillan, N.R. Perkins, A.L. Skidmore, S. Godden, and K.E. Leslie. 2010. An evaluation of Brix refractometry instruments for measurement of colostrum quality in dairy cattle. J. Dairy Sci. 93:3713-3721.
  7. Bartier, A.L., M.C. Windeyer, and L. Doepel. 2015. Evaluation of on-farm tools for colostrum quality measurement. J. Dairy Sci. 98:1878-1884.
  8. Lora, I., A. Barberio, B. Contiero, P. Paparella, L. Bonfanti, M. Brscic, A.L. Stefani, and F. Gottardo. 2018. Factors associated with passive immunity transfer in dairy calves: combined effect of delivery time, amount and quality of the first colostrum meal. Animal. 12:1041-1049.
  9. Stewart, S., Godden, S., Bey, R., Rapnicki, P., Fetrow, J., Farnsworth, R., Scanlon, M., Arnold, Y., Clow, L., Mueller, K. and Ferrouillet, C. (2005). Preventing Bacterial Contamination and Proliferation During the Harvest, Storage, and Feeding of Fresh Bovine Colostrum. J. of Dairy Sci. 88(7), pp.2571-2578.
  10. Buczinski, S., E. Gicquel, G. Fecteau, Y. Takwoingi, M. Chigerwe, and J.M. Vandeweerd. 2017. Systematic review and meta-analysis of diagnostic accuracy of serum refractometry and brix refractometry for the diagnosis of inadequate transfer of passive immunity in calves. J. Vet. Int. Med.