Gestion des poulains

Gestion des nouveau-nés
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Comme les nouveau-nés d’autres espèces animales, les poulains courent un risque élevé de contracter des maladies infectieuses et non infectieuses peu après leur naissance. Une gestion attentive et cohérente est essentielle pour empêcher ces maladies de se manifester. 

 

Dans cette revue GAMAE, nous aborderons les points suivants :

Gestion des juments gestantes

État général

Un des principaux défis des programmes d’élevage consiste à assurer un état de chair optimal pendant la gestation et la lactation. Pour ce faire, il faut tenir compte des besoins énergétiques de la jument. L’objectif est d’atteindre un équilibre énergétique approprié, où les juments gestantes ne vont ni perdre ni prendre beaucoup de poids.

 

Sous-alimentation/maladie : Lorsque les juments perdent soudainement du poids, ce qui peut être dû à une sous-alimentation ou à une maladie, cela peut entraîner une diminution du poids du poulain et affecter la qualité du colostrum et la production de lait de la jument, augmentant ainsi le risque de maladie. 

 

Suralimentation : Peut entraîner une baisse de la qualité du colostrum chez les juments. Elle peut également rendre le poulinage plus difficile en raison de l’accumulation de graisse dans le canal de naissance de la jument. Les juments gestantes ne doivent pas dépasser un indice d’état de chair de 7,5 sur 9. Idéalement, elles doivent pouliner avec un indice d’état de chair de 6 ou 7 (de modérément charnue à charnue) afin de ne pas descendre en dessous de 5 pendant la lactation. 

 

Suppléments

Il a été prouvé qu’une supplémentation en sélénium et en vitamine E en fin de gestation favorisait le transfert du colostrum. La supplémentation en cuivre en fin de gestation peut également contribuer au développement d’un squelette sain chez les poulains1. 

 

Collaborez avec votre vétérinaire et votre nutritionniste pour vous assurer que l’indice d’état de chair de la jument est optimal tout au long de la gestation et que la supplémentation de certains minéraux et vitamines a lieu en temps opportun pour améliorer la santé du poulain

 

Vaccination

Les juments doivent être vaccinées contre les maladies en fin de gestation pour améliorer la qualité du colostrum. Plus précisément, le rotavirus A est un agent pathogène spécifique qui est une cause majeure de diarrhée et qui est une maladie très contagieuse chez les jeunes poulains. Pour améliorer la qualité du colostrum contre le rotavirus A, les juments peuvent être vaccinées à 8, 9 et 10 mois de gestation2. Cette mesure contribuera à protéger les jeunes poulains contre le rotavirus si elle est associée à une excellente gestion du colostrum. 

 

Collaborez avec votre vétérinaire pour élaborer un protocole et un calendrier de vaccination afin de vous assurer que le troupeau est vacciné contre toute maladie préoccupante

Gestion du poulinage

Les complications survenant à la naissance sont un facteur de risque pour le développement de maladies chez les poulains. Il est important d’être préparé et de surveiller attentivement la jument avant le poulinage afin de déterminer si une intervention s’impose et qu’elle soit exécutée en temps opportun. 

 

Suivi

La façon la plus courante de prédire le début du poulinage est de commencer à rechercher les changements de conformation survenant environ 335 jours après la dernière saillie. Les changements dans le développement de la glande mammaire (grossissement de la mamelle et cirage des trayons) sont fiables pour indiquer que le poulain est prêt à naître. N’oubliez pas que les jeunes juments peuvent ne pas produire de lait que très peu de temps avant la mise bas. Certaines méthodes moins courantes pour détecter le début du travail chez les juments sont la relaxation et l’élongation de la vulve et le ramollissement des ligaments à la naissance de la queue. Collaborez avec votre vétérinaire pour développer un plan de surveillance afin de prévoir le poulinage. 

 

Quand faut-il intervenir

L’expulsion du poulain est généralement un processus rapide et se produit 15 à 20 minutes après la rupture des eaux (sac amniotique). Si aucun progrès n’est réalisé plus de 30 minutes après le début du travail, une intervention peut être nécessaire et votre vétérinaire ou un préposé qualifié doit examiner la jument en appliquant de bonnes pratiques d’hygiène pour s’assurer qu’il n’y a pas d’anomalies. Après la naissance du poulain, le placenta doit être expulsé dans les 1 à 3 heures qui suivent. Si le placenta n’est pas expulsé après 3 heures, appelez votre vétérinaire, car une rétention du placenta peut entraîner des infections utérines et des laminites. 

Gestion du colostrum

Les poulains sont immunologiquement naïfs à la naissance, ce qui signifie qu’ils n’ont pas développé un système immunitaire pour combattre les infections avant leur naissance. Par conséquent, les poulains comptent sur l’ingestion de colostrum de bonne qualité très peu de temps après la naissance pour acquérir l’immunité de la jument, ce qui les aide à prévenir les infections pendant la période néonatale. C’est pourquoi il est si important que les poulains reçoivent du colostrum de la jument rapidement après le poulinage. 

Pour de plus amples renseignements sur la façon d’améliorer l’immunité des poulains, consultez la section Diminuer la sensibilité et augmenter l’immunité pour réduire la maladie de la revue GAMAE sur L’antibiogouvernance dans l’industrie équine de l’Ontario.

 

À surveiller

Veiller à ce que le poulain se tienne debout et soit allaité rapidement après la naissance, qui se produit généralement dans les 30 minutes à 2 heures, car un retard dans l’allaitement augmentera le risque d’échec du transfert de l’immunité passive (lorsque les immunoglobulines (cellules de lutte contre la maladie) ingérées en buvant du colostrum ne sont pas facilement absorbées par l’intestin pour être utilisées par le système immunitaire). 

Si le poulain n’a pas allaité en 3 heures, il peut-être trop faible et aurait besoin d’aide pour ingérer suffisamment de colostrum. Pour s’assurer que le poulain reçoit du colostrum de haute qualité, le colostrum de la jument peut être testé à l’aide d’un réfractomètre Brix, où le colostrum est classé comme de meilleure qualité lorsqu’il est mesuré à > 23 %3. Si le colostrum s’avère de mauvaise qualité, il faut servir un supplément au poulain, idéalement au biberon, de 500 ml de colostrum de bonne qualité venant d’une donneuse avant de téter sa mère.

 

Combien suffit ?

Pour s’assurer que le poulain a reçu suffisamment d’immunoglobulines protectrices du colostrum, il est important de tester les niveaux d’immunoglobulines sériques 24 heures après la naissance. Pour ce faire, un échantillon de sang est prélevé et des tests sont effectués en laboratoire ou à la ferme à l’aide d’un réfractomètre Brix ou de réfractomètres optiques. Cela permet de mesurer si le transfert d’immunité passive (le transfert d’anticorps de la mère au poulain) a eu lieu. 

 

Les principales valeurs à prendre en compte sont4,5 :

IgG sériques < 4 g/L (< 7,8 % au réfractomètre Brix ou < 42 g/L au réfractomètre optique)

  • Échec complet du transfert de l’immunité passive (le poulain n’a pas reçu suffisamment d’immunoglobulines)
  • Risque élevé de contracter une infection bactérienne et nécessité d’une transfusion de plasm

IgG sériques entre 4 et 8 g/L (< 7,8 % au réfractomètre Brix ou entre 42 et 44 g/L au réfractomètre optique)

  • Échec partiel du transfert de l’immunité passive
  • Risque d’infection bactérienne, mais des facteurs tels que l’attitude du poulain, la gestion de l’élevage, les problèmes de maladie dans l’élevage et la valeur du poulain doivent être pris en compte avant d’administrer du plasma

IgG sériques > 8 g/L (> 7,9 % au réfractomètre Brix ou > 44 g/L au réfractomètre optique)

  • Le poulain est considéré comme étant dans la fourchette normale     

 

Pour en savoir plus sur les maladies courantes qui touchent les chevaux, et plus particulièrement sur la pneumonie chez les poulains, consultez la revue GAMAE sur L’antibiogouvernance dans l’industrie équine de l’Ontario.

Prévention des occlusions méconiales

Le méconium ou « premières fèces » doit être évacué par le poulain dans les 8 à 12 heures suivant la naissance. Si le poulain ne parvient pas à évacuer le méconium dans les 12 heures, on considère qu’il y a occlusion méconiale, ce qui peut entraîner des douleurs abdominales (malaise, battements de queue), de l’abattement et une réticence à allaiter. Si les poulains n’ont pas évacué leur méconium, un lavement (selon les instructions de votre vétérinaire et dans le cadre de votre plan de poulinage) doit être administré au moyen d’un cathéter souple et flexible. Si l’administration d’un ou deux lavements ne résout pas le problème, contactez votre vétérinaire. 

Gestion du cordon ombilical

Les infections ombilicales sont courantes chez les poulains. Prendre des mesures pour limiter leur apparition permettra d’avoir un poulain en bonne santé. Pour prévenir les infections ombilicales, il est essentiel de prendre en compte la propreté du milieu. Il faut pratiquer une bonne hygiène environnementale dans la zone où le poulinage a lieu et celle où le poulain et la jument seront logés peu après le poulinage. 

Ne pas casser ou déchirer l’ombilic après la mise bas. Laissez cela se produire tout seul, et si cela ne se produit pas, contactez votre vétérinaire pour obtenir des instructions. Il n’est pas conseillé de bander ni de nouer l’ombilic.

 

Désinfection

L’ombilic du poulain est ouvert aux bactéries peu après la naissance, et doit donc être maintenu aussi propre que possible. Il a été démontré qu’une désinfection du cordon ombilical avec de la chlorhexidine à 0,5 % réduisait les niveaux de bactéries sur le cordon ombilical peu après la naissance6 tout en étant irritante que l’iode. Le désinfectant doit être appliqué à la naissance et 2 ou 3 fois au cours des 24 premières heures. 

 

Liens avec le colostrum

Il ne faut pas sous-estimer l’importance de la gestion du colostrum pour la prévention des infections ombilicales. Des niveaux élevés d’immunoglobulines dans le sang après la prise de colostrum aideront à combattre les bactéries qui peuvent pénétrer par l’ombilic ouvert.

 

Pour de plus amples renseignements sur l’hygiène de l’environnement et la biosécurité dans les écuries de juments d’élevage, consultez les sections Gestion des installations pour réduire la propagation des maladies, Prévention et contrôle des infections et Diminuer la sensibilité et augmenter l’immunité pour réduire la maladie de la revue GAMAE sur L’antibiogouvernance dans l’industrie équine de l’Ontario.

Syndrome d’inadaptation néonatale

Le syndrome d’inadaptation néonatale (ou syndrome du poulain factice) est un trouble courant chez les poulains :

  • Sensibilisation réduite à l’environnement 
  • Difficulté à trouver la mamelle et à allaiter 
  • Absence d’affinité avec la jument 

 

Le syndrome d’inadaptation néonatale n’est généralement pas considéré comme une maladie infectieuse. Il n’y a pas suffisamment de preuves ou de recherches à l’heure actuelle pour en déterminer les principales causes, mais on pense qu’il est causé (au moins en partie) par une altération de la circulation sanguine ou de l’oxygène et par des déséquilibres hormonaux. Le syndrome du poulain factice peut survenir lors de naissances normales ou anormales et les symptômes peuvent apparaître très rapidement ou prendre plusieurs jours à se manifester. Le traitement dépend généralement des symptômes observés.

Il est important de noter que si la cause du syndrome du poulain factice n’est pas tout à fait claire, il peut résulter d’une septicémie (infection dans le sang). La septicémie est souvent le résultat d’un mauvais transfert d’anticorps lorsque le poulain n’allaite pas ou ne reçoit pas suffisamment de colostrum.

 

Dans les cas plus graves, les poulains peuvent souffrir des états suivants :

  • Incapacité à réguler la température de son corps 
  • Fonctionnement d’organes compromis
  • Motilité intestinale réduite

 

La manœuvre de compression

Une nouvelle technique a été mise au point trouvée pour assurer la prise en charge du syndrome. Une corde est utilisée afin d’exercer une pression de compression au milieu du corps du poulain pendant 20 minutes7. On a révélé que l’utilisation de cette technique avait permis une récupération plus rapide de certains poulains chez qui le syndrome a été diagnostiqué; la pratique de cette technique a conduit à une amélioration des interactions poulains-juments en plus de limiter les problèmes de santé. Collaborez avec votre vétérinaire pour apprendre comment cette technique fonctionne et comment l’appliquer correctement.

 

Messages à retenir

  • Pour améliorer la santé et le bien-être des poulains, la bonne gestion commence avant même leur naissance en assurant une nutrition adéquate de la jument
  • À la naissance, il est important de prévenir les complications du processus de mise bas et de faire en sorte que le poulain consomme le plus tôt possible un colostrum de qualité
  • Un environnement propre pour le poulinage contribuera à la protection contre les infections ombilicales et d’autres maladies
  • Collaborez avec votre vétérinaire pour élaborer une stratégie de gestion des poulains dans votre exploitation

Références

  1. Peugnet, P., M. Robles, L. Wimel, A. Tirade, et P. Chavatte-Palmer. 2016. Management of the pregnant mare and long-term consequences on the offspring. Theriogenology. 86:99-109. 
  2. Sheoran, A.S., S.S. Karzenski, J.W. Whalen, M.V. Crisman, D.G. Powell, et J.F. Timoney. 2000. Prepartum equine rotavirus vaccination inducing strong specific IgG in mammary secretions. Vet Rec. 146:672-673.  
  3. Schneider, F., et A. Wehrend. 2019. Quality assessment of bovine and equine colostrum – An overview. Schweizer Archiv fur Tierheilkunde.
  4. Elsohaby, I, C.B. Riley, et J.T. McClure. 2018. Usefulness of digital and optical refractometers for the diagnosis of failure of transfer of passive immunity in neonatal foals. Equine Veterinary Journal. 51.
  5. Acworth, N.R.J. 2003. The healthy neonatal foal: Routine examinations and preventative medicine. Equine Vet Educ. 15:207-211. 
  6. Lavan, R.P., J.E. Madigan, R. Walker, et N. Muller. 1995. Effects of disinfectant treatments on the bacterial flora of the umbilicus of neonatal foals. Biology of Reproduction. 52:77-85. 
  7. Aleman, M., K.M. Weich, et J.E. Madigan. 2017. Survey of veterinarians using a novel physical compression squeeze procedure in the management of neonatal maladjustment syndrome in foals. Animals. 7:69.