La biosécurité dans la production vache-veau

Gestion de la biosécurité
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Examiner la paratuberculose

La biosécurité est essentielle dans les élevages vache-veau pour prévenir les maladies. Certaines pratiques de gestion courantes, telles que l’utilisation de l’élevage de taureaux et l’introduction de nouvelles génétiques, peuvent rendre difficile la mise en œuvre et le maintien de pratiques de biosécurité dans les exploitations de naissage de bovins à viande. 

Introduction

Un sondage1 mené auprès des éleveurs-naisseurs de l’Ouest canadien a révélé que peu de producteurs s’informent des antécédents de maladie des animaux lors de l’achat, que la plupart des producteurs ne nettoient pas l’équipement après avoir manipulé le fumier et que la plupart utilisent le même équipement pour manipuler les aliments et le fumier. Avec l’émergence de nouvelles maladies et la menace accrue de maladies entrant au pays (par ex. Salmonella Dublin, la fièvre aphteuse), il est essentiel d’améliorer les pratiques de biosécurité dans les exploitations bovines.

L’application de pratiques de biosécurité dans les élevages vache-veau peut entraîner plusieurs avantages pour la santé animale, tels qu'une diminution du risque de maladie respiratoire bovine, de diarrhée des veaux1 et d'utilisation d'antimicrobiens.

Cette revue GAMAE permettra de mettre en évidence les éléments clés d’un programme de biosécurité réussi dans une exploitation bovine, en prenant pour exemple Mycobacterium avium ssp. paratuberculosis (ou la paratuberculose).

Qu’est-ce que la paratuberculose?

La paratuberculose (aussi appelée la maladie de Johne) est une maladie bactérienne causée par Mycobacterium avium sous-espèce paratuberculosis (MAP) qui est fréquemment constatée chez les vaches de boucherie canadiennes. En 2014, une étude sur les troupeaux de bovins de boucherie de l’Alberta a révélé que 20 % des troupeaux avaient au moins une vache dont le test de dépistage du MAP était positif. Parmi les troupeaux infectés, 22 % des vaches du troupeau ont obtenu un résultat positif confirmant la maladie2.

L’introduction du MAP dans un troupeau vache-veau peut avoir des répercussions importantes, tant au plan économique que sur la santé animale. Les bovins adultes peuvent développer une diarrhée et une perte de poids de longue durée, ce qui entraîne une réforme prématurée, une réduction de la valeur d’abattage et une perte pour  le producteur d’environ 75 $ à 100 $3 par animal infecté. 

Bien que l’effet de MAP sur la santé et le bien-être des bovins soit significatif, la plupart des troupeaux de bovins canadiens ne sont pas infectés par MAP et ceux qui le sont ont tendance à avoir un faible nombre d’animaux infectés. Voilà pourquoi la mise en œuvre ou l’amélioration des pratiques de biosécurité peut contribuer grandement à réduire le risque d’infection et les effets qui en découlent.

La biosécurité et MAP

MAP provoque une infection de longue durée dans le tube digestif des bovins, entraînant des diarrhées et une émaciation en raison de l’impossibilité d’absorber les nutriments. MAP peut demeurer silencieux pendant 2 à 10 ans après l’infection avant que les bovins ne présentent des signes cliniques, connus sous le nom de paratuberculose. 

Les vaches infectées excrètent le MAP dans leur environnement par le biais du fumier/des fèces lorsque l’infection est « silencieuse » et lorsqu’elle présente des signes cliniques. La bactérie peut se propager par transmission fécale-orale, ou par ingestion du lait et du colostrum provenant de vaches infectées. Les veaux nouveau-nés (dans les 24 heures de leur vie) sont les plus sensibles4 à l’infection, mais les veaux de moins de 6 mois sont également exposés à un risque accru.

La biosécurité interne à la ferme peut maîtriser la propagation bactérienne du MAP une fois qu'il est présent dans un troupeau, mais des mesures rigoureuses de biosécurité externe peuvent empêcher l'infection de votre troupeau en premier lieu !

La biosécurité externe

Pâturages et introduction d’animaux

La meilleure façon de prévenir le MAP dans un troupeau non infecté est d’éviter l’introduction de bovins positifs5. Les bovins infectés par le MAP peuvent sembler en bonne santé tout en excrétant des niveaux élevés de bactéries dans leurs excréments. Par conséquent, si des animaux sont achetés, ils doivent provenir de troupeaux dont le statut négatif est connu, et des échantillons de sang ou de matières fécales doivent être prélevés pour tester l’infection de chaque animal avant son intégration dans le troupeau. 

MAP peut survivre jusqu’à 55 semaines dans certains environnements6. Des bovins sains partageant des pâturages avec des bovins positifs au MAP peuvent entraîner la transmission de la maladie. Il est important de s’assurer que les bovins d’autres troupeaux n’ont pas eu accès au pâturage ou au logement que vous utiliserez pour vos animaux afin de prévenir la transmission du MAP.

 

Les gens, les véhicules et l’équipement

Les gens, les véhicules et l’équipement peuvent potentiellement agir comme des porteurs de MAP et ajouter au risque global de maladie. Pour empêcher l’introduction de MAP à la ferme par ces voies, des panneaux de biosécurité et des avertissements doivent être affichés et les visiteurs doivent porter des bottes et des vêtements propres (c’est-à-dire non contaminés par du fumier). Les véhicules et l’équipement doivent être régulièrement nettoyés et désinfectés. Comment ? Il faut essuyer et frotter toutes les matières organiques de la surface, rincer à l’eau chaude et au savon, puis utiliser un désinfectant approprié. Lisez et suivez toujours l’étiquette des désinfectants pour vous assurer qu’ils sont utilisés de manière appropriée. 

La biosécurité interne

 

Mode de gestion

Les veaux constituent le groupe le plus sensible à l’infection par MAP; par conséquent, la maîtrise de MAP dans une population résidente commence par la limitation de l’exposition des veaux à la bactérie. La surveillance et la gestion attentive de la contamination de l’environnement, des aliments et de l’eau peuvent réduire l’exposition des veaux aux matières fécales des vaches et diminuer le risque de transmission de MAP de la vache au veau.

Il est important de prendre en compte la zone où les veaux naissent et sont allaités pendant les premiers mois de leur vie. L’agrandissement de cette zone, la mise en place de plusieurs points d’accès à l’eau et le déplacement fréquent (voire quotidien) des zones d’alimentation des vaches peuvent empêcher que les zones d’alimentation et d’abreuvement ne deviennent boueuses et contaminées par des matières fécales. Ces pratiques peuvent diminuer encore davantage le risque de transmission du MAP en réduisant le risque pour les veaux d’entrer en contact avec des trayons et des pis contaminés. Dans les troupeaux qui comptent des vaches infectées, les recherches montrent que MAP est souvent présent sur le pis des vaches non infectées lorsque de mauvaises pratiques d’hygiène sont utilisées5.

Une autre stratégie à envisager est un programme de dépistage et d’abattage. Les animaux infectés au sein du troupeau peuvent être identifiés en effectuant des tests sanguins ou fécaux sur tous les bovins adultes. Les animaux dont le test sanguin ou fécal est positif sont susceptibles d’excréter le MAP dans l’environnement et sont des candidats potentiels à l’abattage. Les veaux issus de mères infectées ne doivent pas être conservés comme animaux reproducteurs, car ils sont également susceptibles d’être positifs, étant donné que la transmission du MAP se fait de la vache au veau in utero, par le colostrum ou le lait, et par la voie fécale-orale6. 

 

Nettoyage et désinfection

La zone qui exige le plus haut niveau de propreté est la zone de vêlage ou la zone où les veaux sont gardés au début de leur vie. En empêchant l’accumulation de fumier dans la zone de vêlage et en évitant de partager un enclos de vêlage avec des vaches malades ou boiteuses, on contribuera à réduire l’exposition environnementale au MAP7,8. Le fait de nettoyer et de désinfecter fréquemment les enclos de vêlage et de s’assurer qu’ils sont propres et secs contribuera à réduire la transmission aux jeunes animaux. 

 

Le personnel

En fin de compte, le personnel qui travaille avec le bétail est responsable d’appliquer les changements de gestion visant à mieux maîtriser le MAP. C’est pourquoi il est essentiel de s’assurer que chaque personne à la ferme qui travaille avec le bétail comprenne pourquoi ces pratiques sont mises en œuvre et adhère au système. Votre vétérinaire peut être une excellente ressource pour contribuer à la formation du personnel et l’aider à comprendre le « pourquoi » de chaque pratique de gestion.

Messages à retenir

Mycobacterium avium sous-espèce paratuberculosis, la bactérie responsable de la paratuberculose, est courante et coûteuse dans les élevages bovins au Canada. Comme c’est le cas pour d’autres maladies infectieuses, le meilleur moyen d’empêcher ces bactéries de pénétrer dans votre établissement est de vous abstenir d’acheter et d’introduire dans le troupeau des animaux potentiellement infectés. Cette maladie peut être maîtrisée en utilisant une combinaison de stratégies de gestion et d’options de dépistage et d’abattage. 

Collaborez avec votre vétérinaire pour déterminer la meilleure stratégie pour prévenir ou maîtriser MAP à la ferme.

Références

  1. Wennekamp TR, CL Waldner, S Parker, et al. 2021. Biosecurity practices in western Canadian cow-calf herds and their association with animal health. Can Vet J. 62:712-718.
  2. Pruvot M, S Kutz, HW Barkema, et a;. 2014. Occurence of Mycobacterium avium subspecies paratuberculosis and Neospora caninum in Alberta cow-calf operations. Prev Vet Med. 117:95-102. 
  3. Pence M, C Bladwin, CC Black. 2003. The seroprevalence of Johne’s disease in Georgia beef and dairy cull cattle. J Vet Diagn Invest. 15:475-477. 
  4. Lombard, J.E. 2011. Epidemiology and economics of paratuberculosis. Vet Clin North Am Food Anim Pract. 27:525-535. 
  5. Roussel AJ. 2011. Control of paratuberculosis in beef cattle. Vet Clin NA Food Anim Prac. 27:593-598. 
  6. Whittington RJ, DJ Marshall, PJ Nicholls, et al. 2004. Survival and dormancy of Mycobacterium avium subsp. paratuberculosis in the environment. Appl Environ Microbiol. 70:2989-3004.  
  7. Puerto-Parada, M., J.C. Arango-Sabogal, J. Paré, E. Doré, G. Côté, V. Wellemans, S. Buczinski, J-P. Roy, O. Labrecque, and G. Fecteau. 2018. Risk factors associated with Mycobacterium avium subsp. paratuberculosis herd status in Québec dairy herds. Prev Vet Med. 152:74-80. 
  8. McAloon, C.G., M.L. Doherty, P. Whyte, S.J. More, L. O’Grady, L. Citer, and M.J. Green. 2017. Relative importance of herd-level risk factors for probability of infection with paratuberculosis in Irish dairy herds. J Dairy Sci. 100:9245-9257.